Qu’est-ce qu’un tissu ? #2

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Dans le précédent billet sur le sujet, je vous avais quitté-e-s en vous promettant de démarrer une « textilothèque » incessamment sous peu. Entre temps, j’ai un peu travaillé mon histoire de tissus, d’étoffes, de textiles, de bouts de chiffons en somme….et je me suis rendu compte qu’il était encore trop tôt pour démarrer cette textilothèque. J’ai beaucoup appris et c’est avec un effroi non dissimulé que je me rends compte chaque jour un peu plus de l’étendue de mon ignorance. Je suis bel et bien entrain de vous annoncer…que je n’ai pas fini d’introduire mon sujet et que pour l’article sur le chambray de coton, on repassera.

À cette suite introductive, il faut  que j’ajoute deux remarques préliminaires :

  • grâce aux suggestions de Kalua, (qui en plus d’avoir un très chouette blog, est ingénieure textile dans la vraie vie) et de mes bouquins, j’ai ajouté quelques remarques et quelques corrections à mon précédent article : si vous voulez aller jeter un oeil, elles sont en rouge dans le corps du texte.
  • pour mes ami-e-s italien-ne-s, je n’ai pas encore le niveau et le vocabulaire nécessaire pour traduire ou résumer un article si technique : je suis désolée. Si l’un-e de vous  parle couramment français, on pourrait essayer de le traduire à deux?

« Sans plus attendre », comme disent les présentateurs télé, abordons notre question du jour :

Comment reconnaître et comprendre une étoffe…dans la pratique?

Dans le précédent article, j’avais évoqué rapidement les notions de fibre et d’armature du textile. L’objectif de l’article du jour est pratiquo-pratique : une fois dans la boutique de tissus, comment allons-nous faire pour reconnaître l’étoffe que l’on a en mains et  savoir si elle va convenir au projet que l’on a en tête.

Reconnaître la fibre et connaître ses propriétés

A- reconnaître la fibre

Reconnaître la fibre nous permettra d’obtenir plusieurs indices sur le comportement de notre textile. Or, les étiquettes de composition ne sont pas toujours présentes. S’il est difficile pour un particulier de déterminer la composition d’un tissu avec autant d’exactitude que le ferait un laboratoire d’analyse, il existe néanmoins des moyens d’avoir une idée assez précise des fibres qui composent notre étoffe grâce à la technique du brûlage.

Pour déterminer la famille à laquelle appartient votre tissu, vous allez faire appel à votre odorat, votre vue et votre toucher.

  • Les matières d’origine animale (laine ou soie) :
En haut la combustion d’un twill de soie blanche et d’une bourette de soie grise; En bas la combustion d’une laine foulée à carreaux et d’une gabardine de laine beige.

L’odorat : lorsque vous procédez à la combustion d’une de ces deux manières, une odeur de « cochon brûlé » (enfin plus exactement de ver à soie brûlé ou de mouton brûlé) se dégage immédiatement. Soyons concrets : vous allez sentir à peu près la même odeur que lorsque vous brûlez des poils ou des cheveux avec un briquet.

La vue :  second point à observer, la couleur du résidu. Si vous vous trouvez face à un textile d’origine animal, la combustion produira une cendre noire.

Le toucher : récupérez un peu du résidu de combustion dans vos mains. Si vous êtes bien devant une fibre animale, vous pouvez l’effriter sans difficulté.

  • Les matières d’origine végétale (naturelle ou artificielle)

Ce test est l’occasion de se rendre compte que la frontière est mince entre une fibre naturelle et certaines fibres artificielles (les fibres artificielles proviennent pour la plupart de la cellulose des végétaux mais leurs propriétés et leur comportement est déterminé chimiquement par l’homme). En effet, que l’on soit face à du coton, du lin ou face à une viscose (d’origine cellulosique aussi…), la combustion va être identique.

Le tissu à carreaux est une flanelle de coton et le tissu noir, une popeline de coton.

Le test que je vous propose peut donc vous aider à faire la différence entre une viscose et une soie mais pas entre un lin et un cupro (même si à l’oeil…vous pouvez souvent faire la différence).

L’odorat : nous sommes face à des textiles issus de fibres végétales….comme le papier! L’odeur d’une combustion végétale est donc celle du papier brûlé.

La vue : les fibres végétales brûlent vite et laisse une cendre grisâtre et poudreuse.

Le toucher : la cendre est poudreuse, légère, très fine. Elle est comparable à la cendre produite par du bois ou du papier brûlé.

  • Les matières d’origine synthétique (fibres issues pour la majorité du pétrole)

Là encore, nous pouvons comparer la fusion (elles fondent au lieu de brûler) des fibres synthétiques à quelque que chose que nous connaissons : la fusion du plastique, à base de pétrole lui aussi!

Polyamide + élasthanne : deux fibres synthétiques à base de pétrole

L’odorat :  cela sent le plastique brûlé

La vue  : le résidu est noir, on constate que la fibre fond et se recroqueville sur elle-même.

Le toucher : le résidu est dur, vous ne pouvez pas l’effriter entre vos doigts.

Petit point sécurité pour les pratiquant-e-s de deux-roues (moto, scooter, bicyclette) : comme vous pouvez l’observer, les fibres synthétiques fondent…qui n’a pas déjà vu un de ses tissus préférés littéralement disparaître au contact d’un fer pourtant tiède? C’est pour cette raison qu’il faut absolument éviter de mettre des collants (sauf des collants pur laine) à deux roues. Une chute sans gravité peut avoir des conséquences dramatiques pour vos jambes simplement parce que les collants en synthétiques auront fondu à cause de la chaleur dégagée par le frottement de vos jambes sur le sol. Cela génère des brûlures graves en lieu et place d’une vilaine égratignure.

Ce test du brûlage peut donc vous aider mais ne vous donnera pas toute les réponses et certaines fibres peuvent être difficiles à différencier. Entre un lin (fibre naturelle végétale) et un Tencel (une fibre artificielle dérivé du Lyocell et composée de bambou et de lin),  il est impossible de faire la différence tant par brûlage qu’en comparant l’aspect général des deux étoffes qui peut être très proche.

Combustion d’un tencel gris et d’un lin noir.

Si vous avez vraiment besoin de connaître la composition exacte d’un tissu, vous pouvez demander à le faire analyser. Stragier le fait gentiment et gratuitement (à condition de ne pas abuser…) si vous leur envoyez votre échantillon.

B- Connaître les propriétés de la fibre

Chaque fibre majeure (laine, soie etc.)  fera l’objet d’un article dédié. Nous commencerons la semaine prochaine par le coton. En attendant, j’ai néanmoins essayé de vous faire une petite fiche mémo pour vous aider lors de vos achats textiles.

Pour acheter un tissu qui convient à votre projet, connaître les attributs propres à chaque fibre peut vous aider : vous allez par exemple préférer un Tencel à un lin si vous souhaitez un rendu plus lourd, qui se froisse moins et qui sèche plus vite. Vous allez systématiquement choisir des fibres dites « hygiéniques » si vous souhaitez coudre des vêtements pour nourrissons car ils supporteront une ébullition et pourront donc être « stérilisés ».

  • Petit point pratique sur les propriétés isolantes d’une fibre : le test de la tasse de thé

Étant une frileuse invétérée, les propriétés isolantes d’un tissu sont souvent importantes pour moi. J’ai une affection particulière pour les textiles naturellement  thermorégulateurs (qui vous maintiennent à une température constante). Ce sont des tissus qui vous permettent de n’avoir ni trop chaud ni trop froid. Il existe un moyen très simple de tester les propriétés thermorégulatrices de votre tissu : se faire un thé.

Commençons par faire bouillir de l’eau et rassemblons les tissus que nous voulons tester : une soie, une viscose, une cotonnade et une laine froide. Mettons notre thé (pour moi ce sera un Prince Vladimir) à infuser.

De gauche à droite, une viscose, une soie, une laine et un coton piqué gauffré.

Pendant que le thé infuse, testons nos tissus en les utilisant comme manchons pour tenir notre tasse. À chaque fois, tenez votre tasse fermement pendant 30 secondes au bas mot. Vous allez vous rendre compte qu’à épaisseur égale, certains tissus laissent mieux passer passer la chaleur et qu’au bout de 30 secondes votre main  commence sérieusement à vous chatouiller. J’ai failli me brûler en tenant la tasse avec mon morceau de coton. En tenant la tasse avec mon morceau de laine en revanche je ne sentais quasiment pas la température de la tasse. Ce type de viscose faisait match nul avec ma soie et transmettait la chaleur de manière raisonnable.

Il est amusant de constater que les tissus les plus isolants ne sont pas ceux vers lesquels notre intuition nous porte. Au toucher un molleton en coton gratté nous paraît plus isolant qu’une laine froide…et pourtant c’est l’inverse!

Un molleton gratté vous isolera moins du froid qu’une laine froide à épaisseur égale. Cela dit, je vous l’accorde, c’est plus douillet. Par ailleurs, le grattage est une technique qui permet de rendre une fibre de coton plus isolante qu’elle ne l’est naturellement.

Faites le test et n’oubliez pas de boire votre thé, il a assez infusé.

Fin de la pause thé, on reprend.

II. Comprendre l’impact du tissage

Là encore les différents tissages méritent un ou plusieurs articles mais je tenais à revenir sur les grands types de tissage et leurs propriétés.

A- le chaîne et trame

Les textiles « chaîne et trame »  sont fabriqués sur des métiers à tisser. Une navette va et vient entre les fils de chaîne (verticaux donc)et passe le fil de trame selon un schéma  régulier  : le passage du fil de trame autour du fil de chaîne s’appele une duite.

Il existe des armures simples, c’est-à-dire des armures constitués d’un seul ensemble de trame et d’un seul ensemble de chaîne, et des armures complexes qui peuvent regrouper plusieurs fils chaîne ou trame.

Les grandes armures simples sont :

  • la toile et ses variantes : natté, cannelé, ou reps, etc. .

Dans le cas d’une toile, vous allez avoir affaire à un tissu dont l’envers est identique à l’endroit, très stable (qui ne se déforme pas facilement).

Il est toujours très agréable de choisir un tissage toile pour des vêtements structurés (par exemple une chemise) : ils sont plus faciles à travailler. Ici ce chambray présentait un tissage toile, avec une armure en damier.

  • Le sergé  et ses variantes : le sergé croisé ou le chevron, etc..

Le tissage d’un sergé produit un motif en diagonal, que l’on appelle une armure diagonale (pensez au tissage d’un denim par exemple). Ce tissu présente systématiquement un envers différent de l’endroit.

Le jean denim présente toujours un envers différent de son endroit en raison de son armure.

Cela peut être amusant de jouer avec les contrastes : dans le cas de cette robe réalisée dans un chambray tissage denim (donc un tissage sergé)  des Trouvailles d’Amandine, j’avais utilisé l’envers du tissu pour créer un contraste au niveau des poignets de manches.

  • Le satin et ses variantes : l’Aïda, le granité, le sablé, etc.

Le tissage satin courant s’appelle tissage de « longs flottés ». Il est caractérisé par une majorité de fils chaînes ou de fils trame (cela dépend) sur l’endroit. C’est cette prédominance qui conduit un tissage satin à être glissant (plutôt que brillant), fluides et lisses. Les tissages satin sont particulièrement adaptés à des doublures de veste ou de manteau car ils vont vous permettre d’enfiler votre vêtement facilement

Pour tester le glissant d’un tissu, pincez le entre votre pouce et votre index et frottez l’endroit contre l’endroit.

Passons aux grandes armures complexes :

  • l’armure gaze : l’armure gaze est une des armures les plus aériennes : les fils de chaîne se croisent deux par deux  et viennent enserrer ainsi les fils de trame. C’est l’un de mes tissages préférés. J’aime particulièrement les doubles gazes de coton c’est-à-dire deux gazes cousues ensembles pour ne former plus qu’une seule et même étoffe. En été, je ne me lasse pas des jolies double-gazes de Nani Iro :
  • le piqué : un ou plusieurs fils viennent compléter le tissage et créer une forme de relief. Pensez par exemple à un coton matelassé, à un nid d’abeille ou à un piqué gaufré (comme le tissu blanc dans le test du thé);
  • le velours : un fil supplémentaire complète l’armure du velours, on appelle ce fil, le « fil poil » : c’est à cause du fil poil qu’il faut toujours couper et repasser son velours dans le bon sens afin de coucher ce fil dans son sens naturel. Il existe différent types de velours, le milleraie, le côtelé, ou la panne.

J’ai cousu ce pantalon dans un velours de coton, ce qui lui donne cet aspect légèrement duveteux que vous pouvez distinguer sur la photo. Il a fallu être attentive à la coupe et au repassage pour respecter le sens du poil : le poil est repassé vers le sol.

B. Le »tricotages » maille

 C’est bien plus tardivement que les métiers à tricoter ont fait leur entrée sur la scène textile (on tisse depuis la nuit des temps…souvenez-vous du papyrus! en revanche les premiers métiers à tricoter date de la fin du XVIème siècle). Les étoffes tricotées sont appelées  « étoffe mailles » parce qu’elles sont constituées de rang (dans la trame)  et de colonne (dans la chaîne) de mailles (de petite boucles donc).

Les deux grands types de mailles sont le tricot dit « trame » ou « à mailles cueillies » et le tricot dit « chaîne » ou à « mailles jetées ».

  • le tricot trame correspond à une façon de tricoter où un seul fil passe dans les boucles formés par un rang. C’est le tricot le plus extensible, en revanche, on peut facilement le démailler. Les tricots « trame » les plus connus sont le jersey avec ses colonnes formant un « v » sur l’endroit, le côte (pensez au « bords-côte ») qui alterne des colonnes de « v » comme le jersey et colonnes en creux  et l’interlock, un tricot double à base de deux côtes. Vous voyez un V sur l’endroit et sur l’envers, l’aspect est lisse. En terme de propriétés, souvenez vous que le côte est le tricot trame le plus élastique, et l’interlock le plus opaque et le moins facilement démaillable. Un interlock ne roulotte pas contrairement à un jersey.
  • Le tricot chaîne correspond à un mode de tricotage vertical : un fil différent alimente chaque colonne. Pour cette raison, le tricot chaîne est indémaillable. En revanche cette multiplicité de fils le rend beaucoup moins extensible que le tricot trame.  Il est souvent utilisé en lingerie ou pour les maillots de bain (mélangé à de l’élasthanne) parce qu’ils offrent un excellent maintient. Les grands types de tricot chaîne sont le tricot simple et la charmeuse.

C. le tulle et les non-tissés

Il s’agit des deux autres structures qui peuvent permettre de constituer un textile. Elles feront chacune l’objet d’un article. Le tulle est la structure qui forme une résille, l’ensemble des dentelles est fabriqué à partir de métier à tulle. Les non-tissés sont fabriqués à partir de la fibre sans que cette dernière soit filée. Dans l’habillement, un non-tissé est rarement utilisé en tant que tissu principal…mais il y a quelques exceptions : pensez aux vêtements jetables du personnel médical!

III. Comment votre textile va-t-il répondre à vos manipulations ?… l’épineuse question de la « main du tissu »

Rappelez-vous, l’objet de cette introduction qui n’en finit pas est de vous aider (et de m’aider moi-même) à choisir un tissu qui convient à mon projet. La question de la main du tissu est donc cruciale puisqu’il s’agit de comprendre comment votre tissu va répondre à une manipulation. J’essaie désormais de vérifier les quatre dimensions suivantes avant d’attribuer un projet à un tissu : le tombant, le poids, la texture et l’épaisseur.

A- le tombant

Le tombant correspond à la façon dont votre tissu va tomber. Oui je sais, je lapalisse sans vergogne. Au lieu de donner des définitions si peu précises, je vous propose donc de comprendre par l’exemple. Je dois avouer que pour moi le tombant reste la propriété la plus difficile à évaluer…il y a tant de nuances!

J’ai essayé de trouver des tissus correspondant à la majorité des types de « tombant », voici donc mes exemples :

Le coton rouge est raide, le jean est légèrement craquant, la mousseline de soie blanche est fluide.

 La raideur d’un tissu signifie que c’est un tissu stable, qui permet de concevoir des vêtements structurés, aux lignes dessinées. Vous pouvez voir que les courbes de mon tissu rouge sont cassantes par endroit.

Un tissu craquant (très honnêtement le jean n’est pas le meilleur exemple) comporte une certaine raideur aussi. En revanche sa légèreté (et c’est pour cela que je trouve que mon jean n’est pas le meilleur exemple) va permettre de construire des volumes bouffants. J’imagine assez bien un doupion de soie.

Un tissu fluide est léger et présente une grande souplesse. Les tissus fluides sont parfaits pour créer de jolis drapés (une robe à col bénitier par exemple) : les lignes de votre vêtement vont être coulantes et l’allure va être légère.

Mon brocard de polyester noir est compact, ma viscose est craquante aussi, mon jersey de viscose bleu marine est nerveux.

Un tissu compact doit présenter une certaine densité, être opaque, couvrant, avec un tissage serré. C’est ce tissage serré qui va permettre de créer des formes et des volumes architecturées. On imagine volontiers un manteau ou une veste dans un tissu compact. Avec plus d’audace on peut songer à une robe aux découpes très structurées : pour le tissu noir que pensez-vous d’une robe trapèze à la Courrège?

Ma viscose se rapproche peut-être un peu mieux que mon jean d’un tissu craquant.

Le jersey bleu marine est nerveux  : cela signifie qu’il fait partie de ces tissus qui vous filent entre les doigts et dont vous avez immédiatement envie de dire qu’ils sont vivants. C’est un tissu réagissant vivement à chaque mouvement, rebondissant et destinés à réaliser des vêtements qui bougent bien.

Mon chiffon de soie fleuri est vaporeux, ma cotonnade rose est compacte, mon satin de soie blanc est nerveux.

Un tissu vaporeux est très léger, très souple, et surtout transparent.  C’est un tissu que vous pouvez vouloir superposer, qui va donner des lignes aériennes à votre vêtement.

Je n’avais pas de tissu plombant sous la main : il s’agit d’un tissu lourd, souple qui permet de faire de beaux drapés, des lignes élancées, des volumes étirées. Comme exemple , je songe à une viscose noire épaisse que j’avais trouvée chez Motif Personnel et donc Anne a fait une combinaison .

B- le poids

Quand les standards peuvent nous aider à utiliser un tissu de façon adaptée, pourquoi ne pas s’en servir?  Le poids du tissu est la plupart du temps indiqué par les fabricants textiles et les merceries disposent souvent de cette information. Si elle n’est pas indiquée, n’hésitez pas à leur demander.

Voici donc un petit memento des poids standards utilisés dans l’industrie de l’habillement.

Les poids standards

Pour mémoire, lorsque le poids est indiqué en gr/mL cela signifie qu’il est évalué en gramme par mètre linéaire (c’est-à-dire  un mètre de tissu dans sa laize) et lorsque le poids est indiqué en gr/m2, il est évalué dans un coupon de tissu d’un mètre sur un mètre (donc dans un tissu dont la laize est raccourcie).

C- l’épaisseur

  • la finesse du tissu

Il est important d’évaluer correctement l’épaisseur d’un tissu en fonction du projet auquel on le destine. L’épaisseur d’un tissu ne dépend pas uniquement de son poids, elle dépend aussi de son tissage, du traitement auquel est soumis la fibre etc. Cela signifie qu’à poids égal, deux tissus de la même fibre n’ont pas nécessairement la même épaisseur. Dans la construction d’un manteau, d’un pantalon ou d’une chemise, nous pouvons être amenés à superposer plusieurs épaisseurs d’un même tissu (pensez au col, à la braguette, à une ceinture…).

A poids égal, ces tissus de même fibre n’ont pas la même finesse (ils ont été repliés autant de fois)

Il est donc important d’évaluer la finesse de votre tissu en le repliant (autant de fois que vous serez amené à le faire dans votre projet) afin de voir si les superpositions d’épaisseurs seront esthétiques et gérables par votre machine à coudre.

  • la compressibilité du tissu

Lorsqu’un tissu est épais et que vous envisagez des surpiqûres décoratives, il faut faire un test de compressibilité (déjà évoqué ici). C’est le test auquel je n ‘ai pas songé lorsque j’ai cousu ma tunique Denver dans une flanelle de coton. Vous pouvez voir que toutes les surpiqûres dues aux ourlets ne sont pas très jolies. On a le sentiment que la ligne de piqûre s’enfonce dans le tissu et crée une sorte de bourrelet. J’aurais dû faire des ourlets à la main au point invisible…..

Pour vérifier la compressibilité de votre tissu, c’est très simple : passez une épingle (comme vous le feriez pour maintenir deux épaisseurs ensemble) dans votre étoffe. Si le tissu gondole autour de l’épingle, il est incompressible. Cela signifie que vous obtiendrez une jolie surpiqûre, bien nette en surface. Si l’épingle disparaît presque et que vous pouvez quasiment maintenir le tissu à plat, méfiance! Votre tissu est compressible, la surpiqûre va s’enfoncer dans le tissu et formera ce bourrelet peu esthétique dont je vous parlais plus haut. Si vous avez une polaire à proximité, essayez : c’est l’exemple parfait d’un tissu compressible.

C- Reconnaître la texture de son textile

C’est la partie la plus facile, la plus évidente du travail à faire avant d’attribuer un projet à un tissu. Elle est si évidente que la plupart du temps, on n’y pense pas. Et pourtant, la texture du tissu a un impact direct sur la réussite d’un projet.

Étudions donc les variations de texture autour d’un même thème :

  • selon le traitement imposé à ses fibrilles, la texture peut varier : entre « sec » et « gonflant »
De gauche à droite, quatre lainages : au toucher mon jersey de laine blanc est très gonflant, mon cachemire lie de vin est velouré, ma laine grise et rayée est légèrement duveteuse, ma laine noire est sèche, nette, sans fibrilles.

À poids et composition similaire, mon tissu blanc sera plus isolant car il est beaucoup plus gonflant.

  • Faire la différence entre les tissus « plats » et les tissus présentant « un relief »
De gauche à droite, nous pourrions qualifier ces tissus ainsi : gaufré, granuleux, froissé et lisse.

Outre les différences d’aspect entre un tissu reliefé et un tissu plat, il faut prendre en compte la façon dont vous souhaitez porter cette étoffe : un tissu avec du relief est plus respirant qu’un tissu lisse qui aura tendance à plaquer contre votre peau.

  • enfin un tissu peut être plus ou moins doux :
Au contact de ma peau, je dois me souvenir que mon laine et paille aura un toucher piquant, mon denim sera rêche, mon coton et soie rose sera plus caressant, presque crémeux et mon jersey de laine sera enveloppant et onctueux.

Ces considérations sur la douceur de votre étoffe vous permettront d’envisager de la doubler et de faire des liens entre le textile et la partie du corps auquel vous voulez l’attribuer : les jambes supportent mieux une étoffe moins agréable que le buste car elles sont moins sensibles. Si vous avez envie d’une chemise en denim, vous choisirez un denim plus souple et plus doux au toucher que celui que je vous présente en photo qui ne conviendra que pour un pantalon ou une veste.

Demandez le programme !

Vous n’allez pas me croire (si vous êtes encore là…), mais je mets un terme à cette introduction indigeste. J’ai bien conscience qu’il s’agit d’un pavé, mais je voulais vraiment poser des bases sur lesquelles nous reviendrons en détails par la suite. J’espère que je ne vous ai pas achevé.

Rassurez-vous les articles suivants seront plus digestes. Sans avoir prévu d’ordre, je pense évoquer les grandes types de fibres en détails (coton, soie, laine, fibres chimiques…) et essayer de comprendre comment les coudre au mieux (un peu à la manière de l‘article sur la couture de la soie crêpe de chine). J’aimerais aussi essayer de mieux comprendre les armatures, le tissage et le tricotage. Enfin, j’essaierai de comprendre quelles sont les différentes finitions que l’on peut apporter à un textile : les imprimés, le dévorage, le florage, les enduits, le laminage…Bref, les ami-e-s, nous avons du pain sur la planche.

Bonne nouvelle, vous n’attendrez pas huit autres mois pour subir un nouvel article sur le sujet : celui sur la fibre de coton est presque terminé!

Voici mes sources pour celles et ceux qui souhaitent creuser le sujet :

  • Le cours de Sandra Betzina sur Craftsy intitulé Fabric Know-How (en anglais)
  • Le Guide des textiles de F. Ferrari aux éditions ESMOD
  • Fabric for fashion de C. Hallet et Amanda Johnston (plusieurs tomes, en anglais, avec des échantillons)
  • Dictionnaire culturel des tissus de Régis Debray et Patrick Hughes, collection Babylone aux éditions Fayard

Cet article a 31 commentaires

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  6. EMILIE

    …je viens de découvrir ton blog, et te félicite ! Je me lance dans la couture et c’est exactement le blog que je cherchais. Très complet, intelligent, moderne, merci! J’ai pas fini de te demander conseil

  7. ANNETTE

    Un grand merci pour cet article passionnant ! Voilà le genre d’infos que je cherche depuis longtemps longtemps… le jour où j’ai commandé un vichy bachette pour coudre une robe d’été à mes filles, j’ai compris que d’apprendre les dénominations n’était pas un luxe (!) – depuis, pas de souci, le fameux tissu est devenu l’un des pantalons préférés de ma petite Choupinette… pour un look que je n’aurais jamais osé sans cette erreur. 😉

  8. MAGALI

    Bravo pour votre article, dont je viens d’achever la lecture… ainsi que celle de plusieurs autres billets de votre blog, que je viens de découvrir ! Un grand bravo, donc, et un grand merci pour cette mine d’informations si précise. J’apprécie particulièrement que vous vous donniez la peine de qualifier précisément les caractéristiques des tissus : les jolis mots font beaucoup ! Et bravo également pour l’élégance de votre geste pour le concours des noces de coton, qui m’a permis de piocher de bonnes idées, notamment l’encyclopédie ! Bonne continuation à vous, je repasserai souvent !

  9. LE PAPILLON

    Merci beaucoup pour cet article extrêmement intéressant ! Détrompe toi, tu n’es pas barbante du tout, au contraire, tu es très pédagogue. Hâte de lire tes prochains articles. (et je comprends mieux maintenant je croisais parfois des gens avec des briquets sur le marché de la Plaine. 😀 Ils n’étaient donc pas des pyromanes. 😀 )

  10. KALUA

    très bon article, bravo ! pour celles qui s’amuseraient à bruler du tissu (ou du fil, ça fonctionne aussi) pour connaitre la matière, quelques fibres ont des caractéristiques facilement reconnaissables : les chlorofibres font une flamme verte, les acryliques sentent l’amande amère et les polyamides (le nylon par exemple) sentent le céleri

  11. PA BRICOLE

    Un grand merci pour ce travail qui m’a beaucoup éclairé. J’irai vers les tissus d’une manière très différente même si on peut pas forcément jouer au pyromane partout (pour cause de detecteurs de fumé obligatoire !). Dommage que je lise l’article à peine trop tard ! Je termine une chemise faite dans un coton fluide qui ne se prête pas du tout à la coupe retenue. En tout cas, je repenserai à l’article lors de mes prochains achat.

  12. SANDRA

    Merci pour cet article, quelle mine d’informations ! J’adore le cupro, on m’avait dit que ce n’était pas une matière en soi mais une façon de tisser particulière. Le cupro peut être du modal, de la viscose ou du polyester dans le cas d’une doublure Bemberg.

  13. CÉ CRÉATIONS

    Quel talent ! c’est très instructif, j’ai tout lu ! vivement la suite et j’en profite pour te féliciter pour avoir osé te lancer dans un nouveau projet professionnel (j’ai rempli ton questionnaire 😉) @bientôt

  14. ANGÈLE

    Ah, comme c’est passionnant ! Et quel joli vocabulaire… je crois que cela fait aussi partie des choses que j’aime dans la couture, tous ces mots évocateurs. Merci pour ce travail.

  15. CLAIRE

    Merci pour cet article très intéressant ! Je suis admirative de votre travail de recherches ! C’est vrai que la matière influence la couture du vêtement ! J’ai cousu une tunique Viviane dans un tissu acheté malgré le conseil de mon petit marchand du marché et elle est importable, le tissu étant trop rigide …Je vais relire encore souvent votre article afin d’éviter d’autres mésaventures!

  16. Mais quel boulot de diiiiiiiiiingue! je suis admirative! et en plus je me coucherais moins bête ce soir. Merci!!!!!!

  17. PETITRADIS

    Bravo pour ce travail et cette mine d’information ! Tes articles sont toujours aussi complets, c’est un régal de les lire (non non, pour moi ce n’était pas un pavé !!). Vivement les suivants !

  18. MIMOUTCH

    Bravo maîtresse Annie Coton ! J’ai adoré lire la suite de ce cours sur les tissus. J’avoue que je l’ai lu plusieurs fois (avec plaisir) et que je suis encore loin d’avoir tout intégré. Je pense m’y replonger encore de nombreuses fois.Ton style est très agréable et démystifie totalement le sujet, j’attends la suite avec impatience.

  19. BLUE GERTRUDE

    Quel travail!!! Merci pour toutes ces informations précieuses. Tu vas finir par écrire un bouquin sur le sujet…Je suis impatiente de lire la suite!

  20. MENTALO

    Merci pour cet article et le temps passé à vous documenter et à tout nous réexpliquer. J’avais commencé à le lire dans le bus, mais on est mieux sur son canapé avec une tasse de thé pour lire tout ça. J’admire sans réserve la démarche systèmatique et encyclopédique qui transparait. J’étais très tentée par le cours Craftsy de Sandra Betzina, mais j’avais peur de le trouver un peu indigeste voire barbant au bout d’un moment. Vous le recommanderiez ?

    1. ANNIE

      Oups, je n’avais pas vu votre commentaire. Pardonnez-moi d’avoir mis tout ce temps à vous répondre. Ce cours n’est pas barbant…si on ne le regarde pas en une fois. J’y reviens régulièrement, je passe d’un chapitre à l’autre sans scrupules. Bref, je m’en sers plus comme d’une aide quand je me pose des questions. Mon seul vrai reproche concernant ce cours : l’auto promotion longue et récurrente que fait Sandra Betzina pour ses ouvrages, ses patrons, sa vie et son oeuvre en général. D’ordinaire, les professeur-e-s sur crafts s’en tiennent à quelques minutes de présentation plutôt intéressantes…entendre SB parler d’elle pendant plus de dix minutes, voilà qui est lourd et barbant!

      1. MENTALO

        Ah merci pour la réponse que je ne vois que maintenant ! Entre temps j’ai profité d’une promotion pour prendre ce cours à 15€. Effectivement l’auto-promotion est crispante à la longue. J’ai trouvé le contenu un peu léger sur le coton, peut-être parce que c’est ce que je connais déjà bien et en revanche bien intéressant sur les matières que j’utilise peu voire jamais.

  21. MACHMALAU

    Wah… Mais quel travail ! Je reste bouche bée… Je ne sais même pas quoi dire tellement je suis scotchée. Que d’informations utiles et ô combien intéressantes ! Vraiment bravo bravo pour ta patience, ton investissement et ton partage. Tu as trouvé ta voie me semble t’il… 😉

  22. JESSICA

    Merci infiniment pour cet article, ce travail fourni ! Article tout à fait digeste et ô combien intéressant ! J’y ai même appris plein de choses ! Je ne connaissais pas les tests de brûlage par exemple, très logique et sûrement facile à réaliser ! Cet article tombe à pic dans la réalisation d’une veste que je suis en train de penser ! Je vais enfin pouvoir déterminer si mon tissu « tweed moderne » (genre veste Chanel) est majoritairement synthétique ou laine ! Hâte de lire la suite !

  23. Quel travail « encyclopédique » ! Je comprends qu’il t’ait fallu autant de temps pour donner une suite à ton premier billet… Cet article est une référence dans le domaine. Bravo !

  24. MARICK

    Waouh quel travail de recherche ! Merci !

  25. CHRISOU

    Très bel article , très bien construit , très clair et si bien documenté ! Je l’ai lu de bout en bout avec un plaisir infini et j’y ai appris beaucoup de choses . Ton travail de recherche est considérable et la rédaction parfaite . Merci beaucoup .Je vais attendre avec une grande impatience la suite . A bientôt, Chrisou

  26. EMILIE LG

    Très intéressant ! Et quel boulot tu as fait là….pour une introduction c’est déjà une mine d’informations ! J’ai hâte de lire tes prochains articles sur ce sujet. Merci beaucoup pour le temps passé à rassembler et organiser toutes ces informations, c’est vraiment très enrichissant !

  27. SOLENE M

    Et bien, quel boulot ! On en parle de ce petit côté pyromane ?! ahah
    Me connaissant, j’aurais foutu le feu à la baraque en essayant de faire les tests du brûlage #bonjourjesuisunboulet .. Merci pour tous ces précieux renseignements ! Je viens enfin de comprendre pourquoi certains ourlets étaient vraiment vilains (moches) sur certains de mes tissus (tissus compressibles). Mieux vaut tard que jamais 😉 Hâte de lire la suite !
    So.

  28. Wow, quel travail incroyable une nouvelle fois. Une mine d’infos et des conseils pratiques super utiles. Je me le mets dans un coin et comme j’achète souvent du tissu du confection inconnue, je pense qu’il va beaucoup me servir. Et puis, bon, je ne résiste pas: https://www.youtube.com/watch?v=-xXAKuiojBo

    1. ANNIE

      Ah je n’ai pas résisté non plus: : du coup j’ai ajouté l’extrait que tu viens de m’indiquer à l’a fin de l’article;)

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